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Francophonie : perte de vitesse du français

Plan de l'article

La décision dans les années 2010 du Rwanda, ancienne colonie belge francophone, d’adopter l’anglais comme langue officielle à la place du français, afin de résoudre les problèmes engendrés par la diversité linguistique interne de ce pays des Grands Lacs d’Afrique centrale et de l’intégrer davantage à la mondialisation, montre la claire perte de vitesse du français dans les espaces francophones. Cependant, la perte de vitesse du français en termes de nombre de locuteurs et d’influence culturelle dans le monde n’est pas un phénomène nouveau. 

La francophonie, une origine colonial et élitiste, en perte de vitesse depuis bien longtemps

L’essor francophone par la colonisation française : une perte de vitesse lors d’échecs coloniaux

La première perte de vitesse du français dans le monde s’est fait ressentir en Europe au XVIIIème lorsque la France possédait encore un vaste empire colonial sur les cinq continents (Louisiane, Guyane, Haïti, Afrique, Inde, Vietnam) et était vue comme la puissance dominante du Vieux Continent. La Guerre de Sept Ans vient mettre un coup d’arrêt à la francophonie en Asie et aux Amériques dont on ne voit plus que les miettes : dans l’ancienne Grande Louisiane française, seules certaines minorités de La Nouvelle-Orléans et le Québec comptent encore des locuteurs français. De même alors que le français était la langue la plus répandue parmi les élites indiennes, elle ne sera plus jamais utilisée comme telle dans cette région du monde, complètement supplantée par l’anglais. Par spéculation historique, on aurait pu imaginer une francophonie bien plus élargie sur les cinq continents qu’actuellement bien que le Québec ou Haïti aient fait du français leur bouclier identitaire face au monde anglo-saxon et seront donc certainement des 

Cependant, c’est aussi les succès coloniaux (si le terme de succès est vraiment approprié) qui expliquent la francophonie actuelle comme le montre bien AbdelKader Kherfouche dans son article « L’héritage colonial de la francophonie » publié dans Orient XXI. En effet, les populations francophones ; c’est-à-dire celles dont les institutions et les individus utilisent le français comme langue maternelle, administrative et/ou culturelle, sont majoritairement issues de la colonisation française du XIXème siècle. Ainsi les anciens empires coloniaux d’Afrique de l’Ouest et d’Indochine ont laissé place à un vaste espace francophone international qui se réduit cependant toujours plus depuis la prise d’indépendance de ces pays du fait du déclassement de la France par rapport à sa domination et à son influence sur le monde. Par exemple, l’ancien espace indochinois, composé aujourd’hui du Cambodge, du Laos et du Vietnam ne laisse place aujourd’hui qu’à de très minces communautés francophones, toutes minoritaires, notamment du fait de la Guerre du Vietnam menée par les Etats-Unis seulement quelques années après les prises d’indépendance de ces pays et qui a vu l’anglais s’implanter comme la langue étrangère majoritaire. Cependant, la francophonie s’explique aussi par sa diffusion au sein des élites mondiales, aujourd’hui remise en cause. 

Le français, une ancienne lingua franca diplomatique : une francophonie des élites 

En effet, la perte de vitesse du français dans le monde s’explique aussi du fait qu’elle a perdu au profit de l’anglais sa fonction diplomatique comme l’explique l’historien Stélio Farandjis dans ses Repères de l’histoire de la francophonie. Le français du XVIIème siècle au XIXème siècle était parlé par toutes les élites européennes ; ce qui participait à l’influence mondiale du français vue comme la langue de la diplomatie et de l’enseignement par excellence. Pendant longtemps, on remarque que dans les colonies européennes non-françaises, les enseignements sont en français, comme en Egypte, colonie britannique, dont l’administration interne décide de passer du français à l’anglais qu’au début du XXème siècle. Cet exemple montre bien la forte influence que le français a pu avoir sur le monde et que sa perte de vitesse en terme de pouvoir au-delà du nombre potentiel ou réel de locuteurs est lointaine et longue. 

Cependant, cette empreinte d’une francophonie des élites mondiales se voit encore aujourd’hui : premièrement, dans l’influence linguistique du français sur les autres langues. Bien souvent, les emprunts des autres langues au français riment avec un certain raffinement dans le cas des langues voisines européennes, et une certaine modernité dans le cas de langues non-européennes. Dans tous les cas, ces emprunts linguistiques sont d’une ancienne ou actuelle francophonie élitiste mais sont aussi la preuve que cette francophonie élitiste est en perte de vitesse puisque ce ne sont plus que des emprunts. 

Deuxièmement, la francophonie est encore élitiste dans le fait que seuls des secteurs élitistes, tels que le luxe ou l’art, demandent encore une maîtrise du français. De même le français sert encore pour les élites africaines qui veulent pousser leurs études dans des domaines spécialisés dans leur pays ou en France. Dès lors, le français rime encore avec élitisme mais plus avec une domination mondiale, à la fois sur le plan colonial et celui culturel. Cela confirme bien la perte de vitesse de la francophonie sur plusieurs siècles, non pas en terme de nombre de locuteurs, mais en terme de pourcentage des locuteurs dans la population mondiale et en terme de soft power sur le monde. 

La Francophonie, une perte de vitesse européenne et un avenir africain ? 

Le français, de moins en moins parlé en Europe ?

La langue française est portée en Europe par la France et certains pays limitrophes comme la Suisse, la Belgique ou encore Andorre ou Monaco. Elle est ainsi la quatrième langue la plus parlée du continent après l’anglais, le russe et l’allemand, trois langues davantage choisies par les élèves européens. Son avenir ne semble donc pas forcément tracé en Europe, bien cantonné aux espaces francophones où le français est une langue maternelle.

Cependant, avec son rôle diplomatique historique et le retrait de la Grande-Bretagne de l’Union européenne, elle devient la deuxième langue maternelle la plus parlée en Union européenne et est vue comme la langue administrative principale. En effet, les capitales de la Commission, Bruxelles et Strasbourg se trouvent en territoire francophone et donnent au français un avantage dans les administrations européennes bien que l’ensemble des administrateurs européens s’entretiennent avant tout en anglais. 

Ce qui pèse surtout pour la perte de vitesse de français en Europe est nécessairement la déprise démographique du Vieux continent malgré les bons chiffres relatifs de la France par rapport au reste de l’Europe. A terme, l’Europe serait un nain démographique (à part si elle accepte une immigration massive) ; ce qui se traduirait dans les chiffres par une baisse nominale et surtout en pourcentage de la part francophone en Europe, en faveur du continent africain notamment.  

L’Afrique, terre de la majorité des locuteurs francophones actuels et à l’avenir ? 

L’Afrique du Nord et de l’Ouest est le dernier espace à avoir été décolonisé par la France : cependant, ce n’est pas la raison principale de l’importance de la francophonie dans cette région. La raison principale est que les prises d’indépendance ont majoritairement été pacifiques (hormis l’Algérie, le Cameroun et Madagascar). Cela a permis aux dirigeants français de très bien s’entendre avec les nouveaux dirigeants africains donnant naissance à la Françafrique longtemps symbolisée par l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF). Dès lors, la francophonie, loin d’être en perte de vitesse, a continué bon train du fait de l’importance des relations entre les élites françaises et africaines mais aussi du fait que le français est utilisé par bon nombre de ces pays comme langue fédératrice face aux diversités linguistiques locales. 

Il faut distinguer les pays dans lesquels le français est simplement une langue de culture de ceux où elle est aussi une langue administrative voire une langue maternelle. Par exemple, les pays où la confession musulmane est majoritaire ont combattu le français pour mettre en avant l’arabe. Pourtant, le français reste une langue culturelle pratique pour ses ressortissants lorsqu’ils interagissent avec l’Afrique de l’Ouest ou pour profiter d’opportunités éducatives ou professionnelles en France. A l’inverse, la République démocratique du Congo utilise le français comme langue administrative pour que les communautés se comprennent entre elles, au point où le français est devenu une langue maternelle pour certains habitants de Kinshasa. 

Cependant, l’importance de l’OIF et du français est remis en cause par bon nombre de ressortissants africains qui y voient des armes du néocolonialisme français et un frein au développement des pays africains comme le soulignent à répétition les médias africains tels que Le Pays-Ouagadougou au Burkina Faso dans son article « Francophonie. Un instrument politique au service de la France ». Ils préconisent notamment l’apprentissage de l’anglais voire du chinois pour permettre aux pays africains de davantage intégrer la mondialisation et d’être plus dynamique économiquement. On comprend ici qu’il y a bien des luttes d’influence et de pouvoirs internes qui sont en jeu à propos de qui a le pouvoir en Afrique : quitte à être dominé par un étranger, autant être dominé par celui qui vous apporte le plus ? Cela signe une nouvelle perte de vitesse du français dans les territoires francophones africains alors même que ces territoires devaient être le futur de la francophonie du fait de leur dynamisme économique et surtout démographique. 

Dès lors, se pose la question qui fâche pour la France : celle de l’abandon de son hégémonie linguistique sur ses anciennes colonies pour sauver la francophonie et l’influence mondiale du français. Il faudrait notamment accepter au sein de l’OIF que le français est devenue une langue majoritairement africaine mais cela relèverait d’un internationalisme que les récentes et futures élections en France ne semblent pas montrer chez les citoyens français, et ce malgré l’importance démographique et encore plus culturelle, de ressortissants d’origine africaine. Le plus important pour l’avenir de la francophonie est certainement un apprentissage de la langue facile et clair, accessible partout grâce à des formations en ligne comme OrthographIQ qui permettent à tous les ressortissants francophones d’améliorer leurs performances professionnelles et personnelles par une meilleure maîtrise écrite et orale du français partout dans le monde. 

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Publié le  
27/5/2022
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